Atelier d’étude psychanalytique 2023/2024

Mélancolie, addictions,

des symptômes contemporains ?

 

Le dernier enseignement de Lacan nous invite à un affinement de nos outils conceptuels dans le repérage des formes discrètes de la psychose. En introduisant le concept de psychose ordinaire, J.-A. Miller a contribué à une extension du champ des psychoses mettant en relief des formes variées dans la clinique ordinaire contrastant avec les grandes formes psychiatriques classiques. Notre clinique s’oriente désormais à partir d’un repérage des signes discrets. "Disons que lorsque le symptôme est du modèle chêne, quand la tempête arrive le déclenchement est patent. Lorsque la structure tient plutôt sous l’aspect roseau, que le sujet a élaboré un symptôme en glissade, à la dérive, le cas ne prête pas à un franc déclenchement. […] Les psychoses ordinaires sont principalement de type roseau"[1].

 

Par ce propos introductif, nous souhaitons souligner l’enjeu posé par J.-A. Miller concernant le repérage de la structure dans la conduite des cures dans un contexte où le réglage sur l’Autre n’est plus de mise pour s’orienter dans la clinique contemporaine. En effet, notre époque marquée par le déclin de la référence au nom du père comme signifiant maître, nous oriente vers une clinique du particulier du symptôme, au-delà du repérage de la logique signifiante et de la dialectique du désir.

 

J.-P. Deffieux notait dans sa conférence "Un monde sans Autre ?"[2] que, de nombreux sujets confrontés à la défaillance symbolique du père, témoignaient d’un "manque d’appétit de vivre"[3] ou d’un sentiment de perte du sens de l’existence qui les isolent seuls avec leur jouissance. Repérer cette difficulté à s’engager dans un lien de désir comme étant l’index d’une "difficulté d’aliénation avec le signifiant vital qu’est le phallus"[4] pouvant masquer une position mélancolique, est selon J.-P. Deffieux, crucial pour la suite du traitement. En effet, il n’est pas rare que ces sujets se défendent d’une position mélancolique en recourant aux objets de jouissance qui les satisfont selon une modalité addictive, c’est-à-dire sans limite.

 

Nous souhaitons ainsi cette année, interroger les nouages entre position mélancolique et addictions. Nous partirons d’une lecture théorique et clinique orientée par le repérage des petits signes discrets, entre le vide et l’angoisse, comme "masques" d’une "position mélancolique"[5], telle qu’elle peut se révéler dans la clinique des addictions.
 

[1] Miller J.-A., La psychose ordinaire. La convention d’Antibes, Paris, Seuil / Agalma, coll. Le Paon, (dir.) Miller J.-A., 1998, pp. 275-276.

[2] Deffieux J.-P., "Un monde sans Autre ?", conférence donnée à Montpellier le 10 juin 2023, lors d'une rencontre organisée par l'ACF en Voie domitienne.

[3] Ibid.

[4] Ibid.

[5] Marret-Maleval S., "Mélancolie et psychose ordinaire", in La Cause freudienne, 2011/2 (N° 78), pp.248-257.

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